L’accord MEDEF-CFDT, un accord de dupes

Mardi 5 février 2013

L’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 signé par le patronat et trois syndicats (CFDT, CFTC et CFE-CGC) a déjà fait l’objet d’articles sur notre site :

La FEP-CFDT, Fédération de l’enseignement privé, le commente également dans sa publication Syndicalisme Hebdo – pages spéciales Formation et Enseignement privés no 1162 du 24 janvier 2013.

Vous trouverez dans le tableau ci-dessous l’intégralité de l’article de la FEP-CFDT (colonne de gauche) avec nos commentaires (colonne de droite) largement inspirés du travail effectué par la Fondation Copernic et par Gérard Filoche, ancien inspecteur du travail et membre du Bureau national du Parti socialiste.

Le texte de la FEP-CFDTNos commentaires
Un texte ambitieux
La dernière séance de négociation « Sécurisation de l’emploi » s’est tenue jeudi 10 et vendredi 11 janvier.Les négociateurs de la CFDT sont parvenus à un texte ambitieux pour l’emploi et les parcours professionnels des salariés comportant des avancées substantielles sur ses revendications.
On verra que dans cet article, la FEP-CFDT ne rend compte que d’un seul volet de l’accord : celui dit de « la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés ». Rien sur l’autre volet « pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises ».
Pour la CFDT, il y avait quatre sujets incontournables : En limitant très rapidement ses ambitions à quatre sujets, la CFDT a facilité la tâche des négociateurs du MEDEF
la création d’une complémentaire santé pour tous les salariés et demandeurs d’emploi (jusqu’à douze mois d’indemnisation) avec un financement de l’employeur ; - Notons qu’une telle couverture est déjà en place dans de nombreuses branches professionnelles, que les délais de mise en place pourront aller jusqu’au 1er janvier 2016 et qu’elle sera financée pour moitié par les salariés. Elle ne profitera pas au conjoint et à ses enfants et sera une manne pour le patronat des assurances ; la prévoyance en est exclue.
Certes la durée de l’indemnisation pour les demandeurs d’emploi passe de 9 à 12 mois, mais elle est soumise à de nombreuses conditions, notamment celle d’avoir suffisamment travaillé pour percevoir l’allocation-chômage et de ne pas avoir démissionné ; en sont exclus les salariés des professions agricoles ou libérales, de l’économie sociale, de la presse et de l’enseignement privé (sauf « hors contrat »).
- la mise en place de droits rechargeables à l’assurance chômage, afin que les demandeurs d’emploi qui retrouvent un travail ne perdent pas les droits déjà acquis ; - Il faudra que le salarié dispose de nouveaux droits acquis lors de sa reprise d’emploi et ce droit ne sera effectif qu’après la renégociation de la convention d’assurance-chômage qui devrait intervenir d’ici la fin de l’année ; de plus, il ne devra pas aggraver le déséquilibre financier, c’est-à-dire que ce qui sera donné aux uns sera retiré aux autres.
- la taxation des contrats courts avec une augmentation significative de la cotisation patronale d’assurance chômage ; - Les majorations de cette cotisation (et non taxation) sont peu élevées : de 0,5 à 4 points de plus. Les cas d’exception sont nombreux : les CDD pour remplacement d’un salarié absent ou pour emploi à caractère saisonnier sont exclus ; de même les CDD si un CDI vient les conclure. Les contrats de travail temporaire ne sont pas concernés. Seuls 30 % des CDD seront concernés.
Le coût de la mesure pour le patronat est évaluée à 110 millions d’euros ; mais l’exonération de cotisation d’assurance-chômage pendant 3 à 4 mois pour l’embauche des jeunes de moins de 26 ans lui fera économiser quelque 150 millions d’euros.
- l’encadrement des temps partiels imposés. - L’accord introduit une durée minimale d’activité fixée à 24 heures par semaine mais, là encore, comporte toute une série d’exceptions qui permettront de déroger facilement à cette obligation. De plus, l’accord n’est pas clair quant à la possibilité par des accords de branches de fixer la majoration des heures complémentaires à seulement 10 % (et non plus à 25 % pour celles comprises entre le 1/10e et le 1/3 de la durée prévue au contrat.
Au-delà de ces sujets, le texte contient d’autres avancées pour les salariés : Et d’encore plus nombreuses reculades
- la création d’un compte personnel de formation tout au long de la vie ; - La nouveauté consiste en ce que la portabilité du droit individuel à la formation (DIF) est étendue.
Mais le chômeur ne pourra utiliser ce compte que pour une formation identifiée comme prioritaire par Pôle Emploi. L’annexe de l’accord précise que le compte doit être utilisé en priorité lors des périodes de chômage et est soumis à un accord sur les modalités de financement entre les partenaires sociaux, les régions et l’État.
- l’amélioration de la portabilité de la couverture santé-prévoyance pour les demandeurs d’emploi ; - Il s’agit d’une intention ; elle reste à négocier.
- l’élargissement des possibilités de formation pour les jeunes en CDD ; - Quel salarié de moins de 30 ans en CDD va oser demander un CIF à son employeur ?
- la création d’une prime pour les demandeurs d’emploi en Contrat de sécurisation profes­sionnelle qui arrivent en fin de droits à l’assurance chômage ; - Pour bénéficier de cette prime de 1000 euros, il faut être au chômage depuis plus de six mois, être engagé dans une formation certifiante ou qualifiante et dont les droits à l’assurance –chômage seront épuisés avant la fin de la formation.
- la participation des salariés aux conseils d’administration ou instances dirigeantes des entreprises, avec voix délibérative ; - Valable uniquement pour les sociétés et dans les grands groupes, soit 229 entreprises ! Rien pour les associations.
- un rôle plus important pour les instances représentatives du personnel ; - Au contraire, leur rôle est plus encadré et les prérogatives du CE sont limitées.
- l’encadrement favorable aux salariés des accords de maintien de l’emploi. - Inversion de la hiérarchie des normes et remise en cause du principe de faveur. Chantage au maintien de l’emploi, mobilité accrue, etc.
Le Bureau national de la CFDT, réuni mercredi 16 et jeudi 17 janvier, s’est prononcé, unanimement en faveur de cet accord. Par cet engagement, la CFDT entend contribuer à la construction de solutions qui permettent, tout en préservant et en améliorant la situation sociale des salariés, de poser les bases du pacte social dont la France a besoin et de tracer la voie d’un nouveau modèle de développement économique, social et environnemental. La Fep-CFDT engagera ses syndicats à ouvrir les négociations nécessaires à la mise en œuvre effective de cet accord dans les branches et entreprises de son champ fédéral. Comme on l’a dit plus haut, la FEP-CFDT s’abstient bien évidemment de citer la longue liste des articles contenus dans le volet « pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises », lesquels sont tout bénéfice pour les entreprises (cf. articles mentionnés ci-dessus).
Cet accord signé par des syndicats minoritaires doit être combattu par la mobilisation de tous. Les syndicats majoritaires qui ont refusé de signer ce texte et les syndicats écartés de la négociation qui le dénoncent doivent s’entendre pour organiser un front du refus. Les citoyens peuvent écrire à leurs députés et sénateurs de gauche pour les sensibiliser aux reculs sociaux que comporte cet accord.
Un exemple de lettre dont on peut s’inspirer.
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